Séminaire mixte Azhar-Idéo
icon-calendar Samedi 30 septembre 2017
Le 30 septembre 2017 s’est tenue la quatrième séance de notre séminaire mixte Azhar-Idéo. Le thème retenu était celui des définitions historiques de la wasaṭiyya, que l’on traduit habituellement par ‘juste milieu’.
Trois intervenants ont présenté leur recherche sur ce thème : Mlle Inès Ata, de la Faculté des sciences humaines (jeunes filles), M. Tarek Amin, de la Faculté des langues et traductions (garçons) et le frère Jean Druel, de l’Idéo. Tous les intervenants ont redit cette évidence que chaque courant musulman pense qu’il est dans le juste milieu, par rapport à des extrêmes qu’il condamne, que ce soit des extrêmes sécularisés, littéralistes ou violents, entre tafrīṭ ‘indifférence’ et ġulū ‘exagération’.
Il est donc impossible de définir le ‘juste milieu’ de manière absolue si l’on s’en tient à sa dimension de vertu morale, chacun pouvant revendiquer de s’y tenir. Ou pour dire les choses autrement, il est vain de vouloir définir la wasaṭiyya comme un juste milieu entre le sécularisme et le jihadisme. Si le ‘juste milieu’ est un compromis entre les deux, le jihadiste a raison de prétendre qu’il est ‘plus musulman’ que les autres, ce qui est dévastateur pour la communauté.
Historiquement, la wasaṭiyya s’enracine dans l’expression coranique wa-kaḏālika ǧaʿalnākum ummatan wasaṭan (Q2, al-Baqara, 143), que Denise Masson traduit : ‘Nous avons fait de vous une Communauté éloignée des extrêmes’. Une interprétation fréquente de cette expression est que l’islam est un juste milieu entre un judaïsme perçu comme trop centré sur la loi et un christianisme tellement spirituel qu’il en est inapplicable. Dans cette configuration, on ne devient pas ‘plus musulman’ en se rapprochant d’un extrême. Les intervenants ont aussi insisté sur la dimension communautaire de l’islam portée par le verset coranique cité, où le consensus entre les croyants est censé être un garde-fou contre les extrémismes.
Enfin, en théologie musulmane, la wasaṭiyya est l’apanage de l’école ašʿarite, qui se définit comme un équilibre entre un littéralisme qui renoncerait à interroger rationnellement le texte et un rationalisme qui n’aurait pas de compte à rendre à la lettre du texte. Dans cette configuration, c’est l’équilibre et la négociation entre la lettre et la raison qui fait l’islam, pas l’abandon d’une de ces deux composantes.